La vie de Paul

Héritages du judaïsme et de la tradition




Saül de Tarse, plus connu sous le nom de Paul ou Saint Paul, était Juif comme tous les premiers apôtres qui ont suivi Jésus.

C'est donc dans un cadre profondément marqué par le judaïsme que va se développer la foi chrétienne, y compris sous l'impulsion de Paul, bien qu'il se soit dirigé vers les païens.

1. Paul, héritier du judaïsme.

Paul se réfère plusieurs fois à son ascendance juive :

« Je suis moi-même Israélite, de la descendance d'Abraham, de la tribu de Benjamin. » (Romains 11.1)

Il le fait sans complaisance, reconnaissant que cet état de fait a largement contribué à structurer sa personnalité, suivant en ceci l'enseignement des Pharisiens :

« Circoncis le huitième jour, de la race d'Israël, de la tribu de Benjamin, Hébreu fils d'Hébreux et Pharisien quant à la loi.

Persécuteur zélé de l'Eglise, devenu irréprochable selon la justice fondée sur la loi. » (Philippiens 3.5-6)

Tout individu, quelle que soit son évolution, demeure imprégné des messages reçus pendant l'enfance et l'adolescence, et l'instruction de Saül se fit conformément aux règles du judaïsme :

« Je suis un Juif natif de Tarse en Cilicie, mais c'est dans cette ville que j'ai été élevé. J'ai été instruit aux pieds de Gamaliel dans le respect scrupuleux de la Loi des pères, plein de zèle pour Dieu comme vous l'êtes tous aujourd'hui. » (Actes 22.3)

Cette imprégnation d'une tradition religieuse va notamment se manifester par un comportement plusieurs fois évoqué dans l'Ancien Testament qui consiste à déchirer ses vêtements pour exprimer une profonde indignation :

« Les apôtres Barnabas et Paul, en apprenant cela, déchirèrent leurs vêtements et se précipitèrent vers la foule en criant. » (Actes 14.14)

La réaction de Barnabas et Paul face à des hommes qui voulaient pratiquer des sacrifices en leur honneur reflète bien une tradition ou pratique coutumière.

2. La circoncision.

Second signe de la persistance des traditions dans la vie de Paul : la circoncision.

Bien que Paul ait prêché qu'il n'était pas nécessaire de se faire circoncire pour être sauvé, comme le préconisaient les Juifs, il va décider de se soumettre à cette tradition en circoncisant l'un de ses plus proches collaborateurs.

Il s'agit de Timothée, dont la mère, Eunice, était juive :

« Paul voulait qu'il parte avec lui et, après l'avoir pris, il le circoncit à cause des Juifs qui se trouvaient dans les environs. Car tous savaient que son père était grec. » (Actes 16.3)

Etait-ce donc indispensable de se soumettre aux exigences religieuses des Juifs ?

Paul reconnaît l'utilité de la circoncision :

« Quelle est donc la supériorité du Juif et quelle est l'utilité de la circoncision ?

Grande à tous points de vue ! Car c'est d'abord à eux que furent confiées les révélations de Dieu. » (Romains 3.1-2)

Pourtant, en Romains 4.1-24, Paul va se livrer à un long développement au sujet d'Abraham pour démontrer que la justification ne vient pas de la circoncision mais de la foi puisque Abraham, lui-même, fut justifié avant d'être circoncis.

« Et il reçut le signe de la circoncision comme sceau de la justice obtenue par la foi, quand il était incirconcis. » (Romains 4.11)

Aussi, Paul peut affirmer par ailleurs à propos du Christ :

« C’est en Lui que vous avez été circoncis, d’une circoncision indépendante de la main de l'homme. La circoncision du Christ conduit au dépouillement du corps charnel. » (Colossiens 2.11)

Mais si Abraham reçut le signe de la circoncision comme sceau de la justice obtenue par la foi comme l'affirme Paul, il n'est pas surprenant que des disciples non circoncis aient cru qu'il fallait se faire circoncire ce qui suscitera une réaction négative de Paul :

« Moi, Paul, voici ce que je vous dis : si vous vous faites circoncire, le Christ ne vous aura servi à rien ! » (Galates 5.2)

Il subsiste donc une ambiguïté dans les propos de Paul du fait de son héritage pharisien.

3. Les femmes et la tradition.

Mais c'est surtout quand il est question des femmes que Paul exprime une mentalité archaïque ... qui subsiste dans bien des milieux socio-culturels deux mille ans plus tard !

Paul est le produit d'un monde, d'une éducation qui dévalorise les femmes depuis des millénaires.

Il nous livre des enseignements personnels sans préciser si le Seigneur en est la source.

Son approche est peut être issue de son éducation pharisienne car les Evangiles ne relatent aucun propos similaires de Jésus. Paul écrit pour sa part :

« Que la femme s'instruise en silence, en toute subordination.

Je ne permets pas à la femme d'enseigner, ni d'avoir autorité sur un homme, mais qu'elle soit silencieuse.

C'est Adam, en effet, qui fut formé le premier. Eve ensuite.

Et ce n'est pas Adam qui fut séduit mais la femme qui, séduite, tomba en transgression.

Elle sera cependant sauvée par la maternité, en demeurant dans la foi, l'amour et la sanctification, en toute modestie. » (1 Timothée 2.11-15)

La femme sauvée par la maternité ... ne peut-elle donc être sauvée par sa propre foi comme Jésus le dit :

- chez Simon, à Béthanie : « Ta foi t’a sauvée, va en paix. » (Luc 7.50)

- ou à une femme qui touchait Son vêtement pour être guérie : « Aie courage ma fille, ta foi t'a sauvée. » (Matthieu 9.22)

La femme a été séduite par le serpent, certes, et elle accusa celui-ci :

« Le serpent m’a attirée, et j’en ai mangé. » (Genèse 3.13)

L'homme, par contre, accuse non seulement sa femme ... mais aussi Dieu de lui avoir donné la femme qu'Il a créée !

« La femme que tu m'as donnée, celle-ci, elle m’a donné de l’arbre et j’en ai mangé. » (Genèse 3.12)

Mais qu'en est-il de la subordination de la femme résultant du fait que Adam fut formé le premier ?

Le mot Adam est traduit à tort par Homme, mais il vient de l'hébreu "adama" qui signifie terre, exprimant ainsi le fait que l'humanité est issue de la poussière, de la matière.

Adam n'est ni homme, ni femme, car l'humanité est un concept conçu par Dieu qui va ensuite lui donner sa capacité procréatrice avec l'homme (mâle) et la femme (femelle), "ish" et "isha" en hébreu :

« Et il créa, Elohim, l’humain (l'adam) à son image, Il le créa selon l’image d'Elohim, mâle (ish) et femelle (isha) Il les créa. » (Genèse 1.27)

On peut opposer à cette interprétation la seconde version de la Création :

« Alors il fit tomber, JHVH Elohim, une stupeur sur l'humain qui s'endormit. Il prit une de ses côtes, et referma la chair dessous. » (Genèse 2.21)

Le mot hébreu "tsêla" que l'on a traduit par "côte" peut se traduire par "côté", soit l'équivalent d'une moitié !

En réunissant les deux côtés du principe humain, homme et femme deviennent complémentaires pour former un couple et reconstituer l'unité nécessaire au genre humain ... s'il veut procréer.

Mais la tradition ne l'a pas retenu ainsi, préférant donner à l'homme la primauté et une supériorité potentielle.

Car si l'on en croit Paul, la femme doit se taire pendant le culte au lieu de semer le désordre, probablement en bavardant ...

« En effet, Dieu n’est pas un Dieu de désordre, mais de paix. Il en est ainsi dans toutes les Eglises des saints.

Que les femmes se taisent dans les assemblées, car il ne leur est pas permis d’y parler. Mais qu’elles soient soumises, comme le dit aussi la Loi.

Si elles veulent apprendre quelque chose, qu’elles interrogent leur mari à la maison. Car il n'est pas convenable qu'une femme parle au sein de l’Eglise. » (1 Corinthiens 14.33-35)

Si l'on s'en tient à ce principe, il faut en déduire que la femme ne comprend rien face à un homme qui aurait une intelligence supérieure.

Cette mentalité archaïque trouve encore son expression de nos jours notamment par la plus forte proportion de cadres masculins que féminins dans les entreprises.

La subordination de la femme s'exprime aussi par le port du voile que Paul s'efforce de justifier longuement en 1 Corinthiens 11.3-15.

Des trois grandes religions monothéistes, en se fondant sur les recommandations de Paul, le christianisme a été la première religion à imposer le voile aux femmes par des arguments religieux.

Des arguments d'autant plus surprenants qu'ils entrent en contradiction avec les principes d'égalité devant Dieu que Paul soutient par ailleurs :

« Il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus ni homme ni femme, car vous êtes tous un en Jésus Christ. » (Galates 3.28)

Heureusement, les mentalités peuvent évoluer ... et les contradictions que nous portons contribuent à cette évolution !

4. Les limites de la tradition.

Paul se réfère souvent à la Loi de Moïse, notamment quand il cite le Deutéronome (17.6 & 19.15) en matière d'arbitrage :

« Pour la troisième fois je vais chez vous.

Toute affaire sera réglée sur la parole de deux ou trois témoins. » (2 Corinthiens 13.1)

Comme bon nombre de principes énoncés dans l'Ancien Testament, celui-ci est tout à fait profitable.

Mais Paul a mis en garde les disciples du Christ face à la tradition :

« Prenez garde que personne ne vous prenne au piège de la philosophie ou d'autre vaine tromperie s’appuyant sur la tradition des hommes, sur les valeurs du monde, et non sur Christ. » (Colossiens 2.8)

Une mise en garde qui rappelle celle de Jésus quand Il citait Ésaïe (29.13) :

« Ce peuple m'honore par ses lèvres, mais son cœur est loin de Moi.

En vain, ils me vénèrent, les préceptes qu'ils enseignent ne sont que directives humaines. » (Matthieu 15.8-9)

Aussi est-il logique que Paul ait étendu sa mise en garde à toutes sortes de pratiques coutumières issues du judaïsme :

« Aussi, que personne ne vous juge pour des questions de nourriture ou de boisson, à propos d'une fête, d'une nouvelle lune ou du sabbat. » (Colossiens 2.16)

Issu d'un milieu immergé dans des coutumes et traditions étrangères à la vraie foi, Paul a pu, illuminé par l'Esprit Saint, se libérer de son éducation à bien des égards.

Mais si le Seigneur intervient dans nos vies, Il ne souhaite pas pour autant faire de nous des automates.

Respectueux du libre arbitre qui a construit notre personnalité, il subsiste des zones d'ombres qui ressurgissent même chez les plus fervents disciples du Christ ... comme Paul.

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Récapitulatif

des versets cités

dans leurs contextes

1 ... Romains 11.1

2 ... Philippiens 3.5-6

3 ... Actes 22.3

4 ... Actes 14.14

5 ... Actes 16.3

6 ... Romains 3.1-2

7 ... Romains 4.1-24

8 ... Colossiens 2.11

9 ... Galates 5.2

10 .. 1 Timothée 2.11-15

11 .. Luc 7.50

12 .. Matthieu 9.22

13 .. Genèse 3.12-13

14 .. Genèse 1.27

15 .. Genèse 2.21

16 .. 1 Corinthiens 14.33-35

17 .. 1 Corinthiens 11.3-15

18 .. Galates 3.28

19 .. 2 Corinthiens 13.1

20 .. Colossiens 2.8

21 .. Matthieu 15.8-9

22 .. Colossiens 2.16